Fiction 091 by Collectif

Auteur:Collectif [Collectif]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Nouvelles SF Fantastique
Éditeur: Opta
Publié: 0101-01-01T00:00:00+00:00

XVI

La scène se conclut d'elle-même, par le fait que je ne l'y suivis point. C'était céder déplorablement à mes nerfs, mais de m'en rendre nettement compte ne m'aida pas à retrouver le calme. Je ne pouvais que rester là, assise sur la tombe, et essayer, à travers les paroles prononcées par mon jeune ami, de deviner leur sens entier. Lorsque je fus parvenue à l'entrevoir entièrement, j'avais aussi décidé de fournir comme prétexte à mon absence ma confusion de donner un tel exemple de retard à mes élèves et au reste de l'assemblée. Mais ce que je me redisais par-dessus tout, c'était que Miles m'avait arraché un avantage, et qu'il en aurait justement la preuve dans cette maladroite absence. Il m'avait fait avouer que j'avais grand'peur d'une certaine chose, et, probablement, il profiterait de cette crainte pour obtenir plus de liberté. La peur que j'éprouvais, c'était d'avoir à traiter de la question intolérable de son renvoi de l'école, puisque cela se ramenait, au fond, aux abominations qui s'y rattachaient. Que son oncle en arrivât à traiter de ces choses avec moi, c'était une solution qu'en elle-même j'eusse dû désirer maintenant. Mais il m'était tellement impossible de l'envisager que je me bornai simplement à remettre ma décision à plus tard. L'enfant, à ma profonde confusion, était entièrement dans son droit, et dans une situation à pouvoir me dire : « Ou bien vous tirerez au clair avec mon tuteur cette mystérieuse interruption de mes études, ou bien vous cesserez de vous attendre à me voir mener auprès de vous une vie aussi anormale pour un garçon. » Ce qui était très anormal chez le garçon dont il s'agissait en particulier, c'était cette révélation soudaine qu'il avait à la fois conscience de la gravité de son cas – et un plan pour le résoudre.

C'est cela qui me bouleversait, qui m'empêcha d'entrer dans l'église. J'en faisais le tour, hésitante, inquiète. La réflexion, déjà, me venait qu'à ses yeux je m'étais irrémédiablement découverte. Je ne pouvais donc plus rien réparer, et c'était un trop pénible effort que d'aller prendre place auprès de lui sur le banc où nous nous serrions les uns contre les autres. Je le voyais, plus que jamais, prêt à glisser son bras sous le mien et à me tenir là, pendant une heure, en étroit et silencieux contact avec lui. Pour la première fois depuis son arrivée, je souhaitais m'éloigner de lui. Je m'étais arrêtée sous la haute fenêtre de l'est, à écouter les chants religieux qui venaient de l'intérieur. Une impulsion me saisit, qui, je le sentis, allait me dominer complètement, pour peu que je l'encourageasse : je pouvais facilement mettre fin à mon épreuve en prenant la fuite. J'avais l'occasion sous la main : personne n'était là pour m'arrêter ; je pouvais renoncer à toute l'affaire, y tourner le dos et m'échapper. Il n'y avait qu'à rentrer vite à la maison – laissée vide, pour ainsi dire, grâce à la présence à l'église de la plupart des domestiques, – et à y effectuer mes préparatifs de départ.

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